Dans le nord du Mali, les séparatistes touaregs ont accusé mercredi 14 janvier l’armée et le groupe paramilitaire russe Wagner d’avoir tué 7 civils tchadiens et nigériens lors de frappes de drone menées à la frontière algérienne.
Le Cadre stratégique permanent (CSP), alliance de groupes rebelles armés à dominante touareg, a en effet affirmé dans un communiqué que « la coalition terroriste Wagner-FAMA [forces armées maliennes] a procédé à des frappes de drone sur un point de vente de carburant à Talhandak », village carrefour du Nord Mali, dans la nuit de mardi à mercredi. « Cette énième bavure sur des innocents a causé la mort de 7 personnes de nationalités tchadienne et nigérienne ainsi que d’autres victimes qui sont toujours sous les décombres », toujours d’après le CSP. Le CSP affirme également condamner « avec la dernière rigueur ces actes terroristes répétés par la junte de Bamako qui ne visent que les innocents et les infrastructures à caractère civil ».
Les affrontements entre les autorités régulières et les groupes rebelles du Nord pour le contrôle du territoire et des bases militaires laissés par les Casques bleus de la MINUSMA (officiellement retirée du pays depuis le 31 décembre dernier) avaient repris en août 2023 après 8 ans de relative accalmie. Le 14 novembre, l’armée malienne avait fini par reprendre la ville symbolique de Kidal (région de Kidal, nord) grâce à l’intervention de ses supplétifs russes de Wagner. Alors que le Colonel Assimi Goïta, Président malien de la transition, avait officiellement déclaré à la télévision nationale que les « forces armées et de sécurité se sont emparées de Kidal », la milice russe Wagner avait fini par hisser le 22 novembre son drapeau noir siglé d’une tête de mort sur l’ancien fief des indépendantistes du Nord, revendiquant officiellement la prise de la ville, et bien que la junte niait leur présence dans le pays : « Le drapeau de notre orchestre [nom familier donné au groupe par ses membres] a été hissé sur la ville de Kidal ».
Tandis que Wagner avait affirmé que la population civile soutenait leur présence sur place, des membres du Conseil municipal de Kidal s’étaient exprimés sur Africanews peu après la prise de Kidal pour faire part de la terreur semée par l’armée et ses supplétifs russes dans la région : « La présence de l’armée malienne et de Wagner dans la région de Kidal crée la panique au sein de la population civile de Kidal, parce que lorsque l’armée malienne et Wagner passent dans une région, les gens ne voient que des exactions sur les populations paisibles, les bergers » avait affirmé Mama Touré, membre du Conseil.
En effet, depuis août dernier, de lourdes exactions et de violations graves des droits de l’homme perpétrées par l’armée régulière et la milice Wagner ont été régulièrement rapportées, se poursuivant en ce début d’année 2024. Entre autres, après le passage d’un convoi FAMa/Wagner entre le 5 et le 7 août 2023, les populations locales de Sanbani et Soumpi avaient annoncé avoir ramassé 40 corps de civils touaregs et Songhoy (bergers et paysans). Le 5 décembre, les villages de Er-Intejeft, Didi et Kanio avaient été pillés par des membres de Wagner, accompagnés de quelques FAMa, et plusieurs habitants avaient été frappés et dépouillés de leurs biens. Le 24 décembre, c’est le corps de l’enseignant à la retraite Tita Ag Bakrene, ainsi que 5 autres corps d’habitants de Kidal, qui avaient été retrouvés dans l’oued d’Intidbane à Kidal tués par Wagner. Plus récemment, le 8 janvier dernier, des commerces piégés à l’explosif par Wagner ont entraîné à leur activation le décès de 3 personnes à Koyguima, dans la région de Goundam.
Contactée ce mercredi par l’AFP (Agence France-Presse), l’armée malienne n’a pas souhaité communiquer quant à la mort des 7 civils tchadiens et nigériens, à l’instar des précédentes allégations d’exactions.