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Par Hadjaro Alwali – Le récent communiqué du Ministre des Affaires étrangères du Tchad annonçant la rupture d’un accord de défense avec la France soulève plus de questions qu’il n’apporte de réponses. Derrière cette déclaration se cache une opération de communication visant à manipuler l’opinion publique, particulièrement les panafricanistes, tout en masquant les réalités d’un pouvoir tchadien toujours inféodé au système colonial.

Une rupture unilatérale ou un écran de fumée ?

Dans un contexte où les relations entre le Tchad et la France, bien que complexes, restent stratégiques, il est difficile de croire qu’un ministre peu influent comme Koulamallah puisse unilatéralement mettre fin à un accord aussi fondamental par un simple communiqué. Où est la signature de la partie française ? Où sont les preuves d’une véritable négociation ? Tout indique que cette prétendue rupture n’est qu’un coup de théâtre orchestré pour calmer les critiques croissantes contre l’influence française au Tchad.

En réalité, la France a déjà amorcé un retrait progressif de ses troupes. Mais ce retrait n’a rien d’un départ définitif. La stratégie a simplement changé : une présence militaire plus discrète, une influence indirecte exercée à travers des forces locales, dont certaines sont liées à la Légion étrangère. Ainsi, le discours de rupture masque une continuité soigneusement camouflée.

Le piège des panafricanistes

Les panafricanistes, souvent critiques virulents de l’impérialisme français, semblent tomber dans le piège de cette manœuvre politique. Leur lutte, bien que légitime, se concentre uniquement sur l’influence étrangère, au point d’ignorer les injustices internes qui rongent le peuple tchadien. En soutenant indirectement Mahamat Kaka sous prétexte qu’il se distancie de la France, ils contribuent à la perpétuation d’un système qui opprime les Tchadiens.

Mahamat Kaka, loin d’être un allié des panafricanistes, incarne le prolongement d’un système colonial qu’il prétend combattre. Son ascension au pouvoir, en tant que successeur de son père, est le fruit d’un régime néocolonial et autoritaire. Comment peut-il être crédible dans une lutte contre l’impérialisme alors qu’il en est l’un des bénéficiaires directs ?

Un peuple pris en otage

Le véritable problème au Tchad n’est pas uniquement la France. Il réside dans un système de gouvernance qui exploite son propre peuple au profit d’intérêts personnels et étrangers. Le peuple tchadien ne veut ni de Mahamat Kaka, ni de la France, ni de leurs alliés locaux. Il aspire à un leadership nouveau, authentique, lettré et véritablement engagé pour le bien-être national.

Mais cette aspiration reste ignorée. Pendant que le gouvernement distrait l’opinion avec des annonces de rupture, les injustices sociales, les inégalités économiques et les violations des droits humains continuent de miner le quotidien des Tchadiens.Appel à la lucidité et à l’action

La manipulation actuelle ne peut réussir que si nous, en tant que citoyens tchadiens et panafricanistes, manquons de lucidité. Nous devons refuser de nous laisser distraire par des déclarations superficielles et exiger des preuves concrètes de tout changement. La fin d’un accord de défense doit être officielle, signée par les deux parties, et assortie de garanties pour préserver la souveraineté réelle du Tchad.

Nous devons également élargir notre combat. S’opposer à la France est essentiel, mais cela ne doit pas nous détourner de la lutte contre nos propres oppresseurs locaux. Le Tchad ne se libérera pas seulement en renvoyant les puissances étrangères, mais en reconstruisant ses institutions sur des bases démocratiques et patriotiques.

En tant que journaliste, écrivain et acteur de la société civile tchadienne, je lance un appel à mes compatriotes : ne nous contentons pas de demi-vérités. Exigeons la justice, la transparence et un leadership qui incarne véritablement nos aspirations. Le Tchad mérite mieux.

Hadjaro AlwaliAuteur, journaliste et jeune leader tchadien

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